Ce texte parle d’une vis dans un os de la jambe, qu’il n’est pas obligatoire d’enlever, à moins d’une gêne suffisante, et confronte ce détail anatomique à la vie qui ne dure que toute la vie et pas plus.
J’ai une vis dans la jambe, ce qui n’a pratiquement aucun intérêt. À moins de décider ou de continuer d’écrire des textes sans intérêt, il y a un moment de cette vis qui mérite toute de même une petite note. Ce moment, qui mériterait aussi un peu plus de suspens, c’est la mort.
Donc quand je vais mourir…
J’aime bien le texte parce que c’est un endroit où l’on peut parler de la mort un peu comme autour d’une bonne bière, c’est-à-dire tranquille, comme pour un match amical, bon mais moi c’est le texte parce que je ne bois pas de bière et ne fait pas de match.
Quand je vais mourir (donc c’est un texte qui parle aussi de la mort, je ne l’ai pas assez précisé au début, et j’ai un collègue qui veut mieux savoir de quoi parle mes textes, donc là c’est la vis et la mort en fait… mais vu à partir de la jambe), cette vis là, parce que des vis il y en avait plein d’autres après mon opération du genou, mais résorbables (vis d'interférences résorbables), là cette vis dont je vous parle, dans ce texte sur la vis et la mort, cette vis de la mort, elle est en titane et elle va rester.
Toujours aucun intérêt. Là on sait bien de quoi tu causes mon ami, mais rentre chez toi, enfin restes-y, fais un scrabble ou je sais pas, mais c’est pas intéressant… si, si, attendez un peu, j’ai pas fait de suspens avec la mort j’en fais un peu avec la sorte de mort, la manière.
Bon alors moi comme un bon gars de mon siècle je veux bien sûr pas du tout aller dans la 4ème place du caveau de Pontault-Combault dans lequel mon père a mis mes grands parents, puis prévoit d’y mettre lui-même et puis comme il est sympa et qu’un quatre places c’est proportionnellement moins cher qu’un deux places, je ferai son quatrième, trop cool.
Non, moi, rider de feu, tête brûlée, chaud lapin, je veux, enfin je préfère être incinéré.
Je préférerais largement un traitement à froid, j’aime le froid, mais là il ne s’agit pas de vacances ou de stage systema, il s’agit de mourir, de disparaître, donc la cuisson rapide, mais très rapide par pitié, nucléaire si vous avez, c’est ce qu’il y a de mieux je trouve. Bon d’accord avec Céline : en terre, le squelette ressemble toujours mieux à un homme, mais ça c’est quand on veux pas mourir, mais quand on est mort, il paraît quand ne demande plus rien.
Après ce chapitre très dimanche soir (mais là au moins je crois que mon collègue préféré et toute la terre ont bien compris de quoi parle le texte), je vais enfin dire pourquoi ça m’intéresse cette vis en titane et que si j’avais su j’aurais préalablement demandé au chirurgien l’autorisation de graver une petite cacedédi, un petit mot, un pense-bête sur cet élément rapporté de mon corps.
Je vais donc être réduit en cendres (850°), installé dans une urne par le ramasseur de cendres et le metteur de cendres en urne. Je prendrais une petite boîte modeste – mais une urne d’artiste - où certainement le ramasseur et le metteur sont une même personne. Si cet employé a suffisamment d’humour ou s’il est très consciencieux ou si ce texte peut avoir une fonction « dernières volontés », il y mettra la vis (le titane devient liquide à 1900°), tranquille sur son lit de cendres, et là une personne proche pourra recueillir cette offrande mi-tristesse mi-quincaillerie.
La vis sera muette, mais s’il avait dit Salut ma poule ou Bien l’bonsoir, ça aurait assuré pas mal… comme je vous ai dit je n’ai pas demandé l’option.
En fait je voulais écrire un texte sur les lieux culturels qui ouvrent dans les quartiers réputés agités ou louches ou craignos puis lancer campagne pour que l'opération équivalente, sorte de jumellage, ait lieu en retour : à chaque fois qu’une telle chose arrive, autant de m2 doivent être réservés pour l’accueil d’un espace culturel de ces quartiers périphériques dans les beaux quartiers (réputés tout court) du centre.
J’en aurai profité pour placer un petit compte-rendu de visite du 104, fait de la réjouissance d’une ouverture de vide, de Carrefour sans produit, de Pompes funèbres sans mort et de centre d’art sans art. Juste de la promenade.
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